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Tunisie : condamnation à mort de Saber Ben Chouchane – un retour manifeste à l’autoritarisme et une remise en cause des acquis de la révolution

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Communiqué de presse – Tunis / Genève, 3 octobre 2025

Le Comité pour la Justice condamne avec la plus grande fermeté le jugement sans précédent rendu le 1er octobre 2025 par la chambre pénale du tribunal de première instance de Nabeul, condamnant à mort Saber Ben Chouchane, âgé de 56 ans, ouvrier et père de trois enfants, pour des publications sur Facebook critiquant le Président de la République, Kais Saïed.

Les informations disponibles indiquent que Ben Chouchane – qui gérait une petite page Facebook intitulée « Qais le Malheureux » – n’avait aucune activité politique, aucun antécédent violent, et vivait dans des conditions de pauvreté et de précarité. Pourtant, il se voit aujourd’hui infliger la peine la plus sévère du système juridique tunisien simplement pour avoir exercé son droit d’expression. Il a été inculpé sur la base de l’article 67 du Code pénal (insulte au Président de la République), de l’article 72 (tentative de changer la structure de l’État – crime passible de la peine de mort) et de l’article 24 du décret n° 54 de 2022 relatif aux crimes électroniques (diffusion de fausses informations).

Le Comité pour la Justice dénonce fermement l’usage du pouvoir judiciaire comme instrument d’intimidation et d’étouffement des voix dissidentes, et appelle à la libération immédiate de Saber Ben Chouchane ainsi que de tous les prisonniers politiques poursuivis en vertu des articles 67, 72 et du décret 54. Il avertit que la poursuite de telles condamnations sape l’État de droit et menace d’effacer les acquis de la révolution de 2011.

Le Comité souligne que cette peine de mort est la première depuis 2021 et représente un retour manifeste et dangereux à des pratiques autoritaires contre lesquelles le peuple tunisien s’était soulevé en 2011. Il ne s’agit pas d’un simple jugement, mais d’un message de menace systématique selon lequel l’expression pacifique d’opinion pourrait conduire à la corde.

L’affaire repose uniquement sur des commentaires et caricatures publiés par Ben Chouchane, dans lesquels il appelait à la protestation, réclamait la libération des prisonniers politiques et critiquait certaines figures de l’autorité. Le parquet a considéré que ce contenu constituait « une atteinte à la sécurité de l’État » et une tentative de nuire à l’ordre républicain.

Ben Chouchane a été arrêté en janvier 2024, initialement enquêté par le pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, avant que son dossier ne soit transféré au tribunal de Nabeul. Il est resté en détention provisoire jusqu’au prononcé du jugement. Cette condamnation a provoqué un choc considérable, d’autant que la Tunisie n’a pas exécuté de peine capitale depuis 1991.

Le Comité pour la Justice affirme que ce jugement n’est pas un cas isolé, mais reflète un schéma plus large de répression croissante depuis que le Président Saïed a concentré les pouvoirs en 2021. Des lois anciennes et le décret 54 sont utilisés comme instruments contre les opposants, les militants et les citoyens. L’article 72 est devenu un outil pour monter des affaires, utilisé notamment contre Abir Moussi et d’autres personnalités opposantes. Des dizaines de politiciens, avocats et journalistes ont été enquêtés pour des propos ou conversations privées jugés « hostiles à l’État ».

L’article 24 du décret 54 a transformé l’espace numérique en un piège permanent, étant utilisé contre des publications Facebook, des enquêtes journalistiques et même des contenus humoristiques.

Le Comité pour la Justice appelle la communauté internationale, les mécanismes des Nations unies et africains, ainsi que les partenaires de la Tunisie, à agir d’urgence et à exercer une pression sérieuse pour stopper cette dérive alarmante, et garantir la protection des droits et libertés fondamentales pour lesquels les Tunisiens se sont battus lors de la révolution de 2011.

 

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